De la Russie à la Chine : contenir la menace djihadiste

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Retrouvez l’émission Cultures Monde par Florian Delorme :

RETOUR DES TALIBANS : L’ONDE DE CHOC (4 ÉPISODES)

De la Russie à la Chine : contenir la menace djihadiste

Contrairement aux puissances occidentales, la Chine et la Russie ont clairement exprimé leur volonté de dialoguer avec les nouveaux maîtres de Kaboul, avec un objectif clair : contenir la menace terroriste.

L'envoyé spécial chinois Yue Xiaoyong venant assister à une réunion internationale à Doha sur l'aggravation du conflit en Afghanistan, le 10 août 2021.
L’envoyé spécial chinois Yue Xiaoyong venant assister à une réunion internationale à Doha sur l’aggravation du conflit en Afghanistan, le 10 août 2021.• Crédits : Karim Jaafar – AFP

Contrairement aux puissances occidentales, Moscou et Pékin n’ont pas évacué leurs ambassades à l’arrivée des talibans. Chine et Russie ont au contraire exprimé clairement leur volonté de dialoguer avec les nouveaux maîtres de Kaboul, avec un objectif clair : contenir la menace terroriste. Ils craignent en effet que le changement de régime ne déstabilise leurs voisins communs d’Asie centrale, où subsistent plusieurs cellules djihadistes, dont certaines ont collaboré avec les talibans. 

Pour les deux puissances, la menace est double : d’une part, voir les fragiles régimes des anciennes républiques soviétiques s’effondrer sous l’assaut de mouvements islamistes. De l’autre, laisser ces derniers perpétrer des attentats contre leurs intérêts en Asie centrale, voire sur les sols chinois et russes – comme cela avait été le cas à Saint-Pétersbourg en 2017. Face à ces risques, un dialogue ouvert avec des talibans qui promettent de n’avoir aucune ambition hors des frontières afghanes, et jurent qu’ils ne serviront pas de base arrière au djihad global, semble un atout certain. Mais rien ne garantit que le nouveau pouvoir afghan sera à même d’endiguer la menace représentée par les groupes djihadistes concurrents. A commencer par Daesh, dont l’attentat contre l’aéroport de Kaboul, la semaine dernière, a rappelé combien il comptait peser sur le devenir de la région. 

Les talibans seront-ils des interlocuteurs fiables pour Pékin et Moscou dans leur lutte contre le terrorisme ? Quelles étaient les relations antérieures des deux puissances avec le groupe islamiste ? Au-delà de la question djihadiste, quels enjeux l’Afghanistan représente-t-il pour la Chine et la Russie ? 

Florian Delorme s’entretient avec Didier Chaudet, consultant indépendant, spécialiste de l’Afghanistan et de son environnement régional et associé à l’IFEAC (Institut Français d’Études sur l’Asie Centrale) et Emmanuel Veron, géographe, enseignant-chercheur associé à l’UMR IFRAE et à l’Ecole navale.

Malgré une relation de proximité avec les talibans, Poutine, par son ADN sécuritaire, sait bien qu’il peut y avoir en Afghanistan la réactivation de cellules, la recomposition de filières djihadistes articulées à Daesh ou à Al-Qaïda. Il sait que la collusion sécuritaire est tout à fait probable. Emmanuel Veron

Sachant que les Etats-Unis ne sont pas près de pardonner aux talibans, ceux-ci n’ont pas d’autre choix que de parler avec la Russie et la Chine. Ils savent aussi que les Russes n’ont pas les moyens financiers de les aider à reconstruire l’Afghanistan, seule la Chine pourrait le faire. Je ne vois pas les talibans tomber dans une politique du pire. Didier Chaudet

Seconde partie : le focus du jour 

Le Tadjikistan sous pression

Une barrière de barbelés à deux kilomètres du "Friendship Bridge" traversant la rivière Amu Darya, qui sépare l'Ouzbékistan de l'Afghanistan, le 15 août 2021
Une barrière de barbelés à deux kilomètres du « Friendship Bridge » traversant la rivière Amu Darya, qui sépare l’Ouzbékistan de l’Afghanistan, le 15 août 2021• Crédits : Temur ISMAILOV – AFP

Parmi les pays d’Asie centrale qui redoutent la déstabilisation suivant le retour des talibans, le Tadjikistan, qui partage plus de 1300 kilomètres de frontière avec l’Afghanistan, fait l’objet d’une attention particulière. L’ex-république soviétique a lancé le 5 août des manœuvres militaires conjointes avec la Russie et l’Ouzbékistan, d’une ampleur et d’une durée sans précédent. Quelques jours plus tôt, les talibans venaient en effet de conquérir les districts afghans frontaliers.   

Le gouvernement du Tadjikistan ne regarde pas tellement les talibans en eux-mêmes, mais plutôt les groupes affiliés aux talibans qui ont des citoyens tadjikistanais dans leurs rangs : ces derniers ayant des velléités contre le gouvernement du Tadjikistan, ils pourraient se désolidariser des talibans et fomenter des attaques au Tadjikistan.  Mélanie Sadozaï

Avec Mélanie Sadozaï, doctorante à l’Inalco.

Références sonores

  • Extrait d’une conférence de presse d’Angela Merkel et de Vladimir Poutine, dans laquelle ce dernier aspire à un dialogue avec les talibans (20 août 2021)
  • Extrait d’un point presse d’une des porte-paroles de la diplomatie chinoise, Hua Chunying, dans lequel elle affirme que la Chine se félicite de pouvoir développer de bonnes relations avec les talibans (Le Figaro, 16 août 2021)
  • Ambiance de manœuvres militaires russes à la frontière entre le Tadjikistan et l’Afghanistan, le 05 août dernier 

Références musicales

  • « Field » de Christian Löffler (Label : Ki records)
  • « Man Yori Tujam » de l’ensemble tadjik Baraka (Label : Sketis music)

INTERVENANTS

  • Didier Chaudet Consultant indépendant, spécialisé sur les questions géopolitiques et sécuritaires en Asie du Sud-Ouest et en Asie Centrale post-soviétique, auteur sur Asialyst
  • Emmanuel Veron Géographe, chercheur associé à l’école navale et à l’INALCO. Membre de l’IFRAE (Institut Français de Recherche sur l’Asie de l’Est).
  • Mélanie Sadozaï Doctorante à l’Inalco

L’ÉQUIPE

Production Florian Delorme

Réalisation Vincent AboucharBenjamin Hû

Avec la collaboration de Bertille BourdonMargaux Leridon

Production déléguée Mélanie ChalandonAntoine Dhulster

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