Lettre n°8 – Hiver 2021

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Un quatrième trimestre gris foncé

L’échec de la COP 26 de Glasgow pas seulement imputable à une préparation « amateure » a ouvert un trimestre de nuages.

Le monde a montré, en Ecosse, que nul pays et au fond peu de peuples sont prêts à consentir les efforts comportementaux coordonnés nécessaires pour enrayer le réchauffement climatique. Celui-là même qui, quoi qu’il arrive, bouleversera la vie sur terre dès maintenant et jusqu’au moins à la fin du siècle.

L’aboulie des sociétés devient pathétique quand elle s’habille des gémissements vides de Greta Thunberg et autres écolos paralysés par leurs contradictions.

Le diagnostic est pourtant indiscutable.

La solution est claire et connue, coûteuse mais accessible : produire de l’énergie décarbonnée. Certes la mise en œuvre suppose un immense effort collectif ; évidemment plus grand et plus douloureux pour les pays pauvres que pour les pays riches. Tout cela est très injuste. Chaque chose a son prix : « è la vita », hélas.

Washington très à la peine

La débâcle américaine en Afghanistan a montré, comme l’a vu Jean Pierre Perrin qu’au-delà de buts de guerre de plus en plus vaseux, la première puissance militaire technologique et financière a perdu, et mit vingt ans à perdre une guerre gagnée par des paysans misérables construisant à partir d’engrais bas de gamme et de simples téléphones portables les bombes qui ont fait l’essentiel des victimes occidentales de la bataille. Cela aura couté plusieurs centaines milliards de dollars, pour un pays dont le PIB n’atteint pas 25 milliards (en y incluant le bénéfice du trafic de drogue pour une quinzaine de pourcents).

Au-delà du ridicule et de l’amateurisme diplomatique de l’affaire jouée in fine par deux administrations américaines aux styles pour le moins différents, le point de vue d’ensemble est profondément désastreux pour l’occident.

De plus, il apparait clairement, qu’à tout prix, surtout s’il est largement partagé par ses vassaux, les USA veulent maintenir les colossaux dividendes de leur superpuissance, avec une grande économie d’engagement militaire direct.

Dans l’atmosphère générale de perte de confiance dans les occidentaux, des doutes particuliers, effrayants, germent à Taïwan et en Ukraine. En mode mineur il en va de même en Europe dans laquelle, souvent par paresse et « radinisme », les automatismes stratégiques de vaincus d’hier jouent encore, c’est le cas en Allemagne, en Finlande, au Danemark, mais aussi en Espagne en Pologne ou en Hongrie.

La conscience stratégique est à construire dans nos opinions publiques si nous ne voulons pas être des vassaux sacrifiés sur l’autel du seul combat qui compte ; celui qui oppose déjà violemment USA et Chine.

Le Brexit a un an

Après un an il est toujours intéressant de se pencher sur l’apparence de la cicatrice faite par l’amputation d’un membre.

Les conséquences directes de la COVID-19 sur l’économie européenne sont mesurables en termes d’activité, d’augmentation des dettes, ou de création d’épargne. Si tout cela est considérable, l ’effet de masque ne doit pas être évacué, il est néanmoins difficile de trouver des traces significatives du départ britannique sur l’économie et les marchés du continent.

De l’autre côté de la Manche, à part de multiples et souvent vénielles pénuries qualifiées de « petites rages de dents » l’économie du Royaume Uni ne s’est pas enfoncée dans le chaos.

En revanche le désastre politique est patent. La parole de la couronne n’a pas été respectée de la manière la plus grossière et plus provocante qui soit. Amis, partenaires et alliés n’ont plus confiance.

La majorité parlementaire a démontré un niveau de concussion et de corruption massif accompagné d’une arrogante recherche d’impunité. C’est l’illustration de l’abîme social qui existe entre une « upper class » jalouse de ses privilèges et ses alliés politiques xénophobes et populistes. C’est cependant ce paradoxe qui a permis d’élire l’énorme majorité Tory qui siège à Westminster.

Faites ce que je dis ; ne faites pas ce que je fais. Sur tous les plans le parti conservateur est au pied du mur, il va devoir changer son Premier Ministre et son gouvernement s’il veut survivre comme parti de gouvernement.

Les cliquetis du sérail s’entendent jusqu’à Bruxelles.

La Chine qui serre les boulons

Les principaux sujets (sérieux) de conversation à Pékin tournent autour des Jeux olympiques et des variants de la Covid-19. Cela cache de manière presque futile les sujets lourds des disparitions de sportives, d’hommes d’affaires ou d’opposants de tout poil, comme les balbutiements de l’action économique de la puissance publique : faillite d’Evergrande, mise au pas d’Ant, placement sous surveillance tatillonne des investissements des collectivités publiques, contrôle des sociétés chinoises cotées à l’étranger et fort ralentissement de la distribution de crédits aux gouvernements étrangers sous influence.

Une telle raideur dans l’action doit se comprendre comme le symptôme de la difficulté et la complexité qu’il y a à gouverner un pays immense, le plus peuplé du monde en ne s’appuyant que sur une oligarchie constituée d’une cinquantaine de familles appuyées par une élite qui réunit seulement moins de quatre pour cent de la population totale.

Les ambitions, l’avidité et la peur là aussi conduisent les dirigeants si ce n’est à la paranoïa au moins à une fébrilité certaine.

Tout cela a engagé le Japon, l’Australie, la Corée du Sud et l’Inde à un durcissement qui nous rapproche de la vraie guerre.

Les petits sentiers des autres continents

Afrique et Amérique latine poursuivent leur triste chemin les yeux fixés vers le Nord.

Trahis par leurs élites, leurs peuples désespérés continuent de vouloir fuir vers des terres supposées plus accueillantes ; ce que précisément elles sont de moins en moins.

Notre Europe, toute l’année, quant à elle, aura été aux prises avec de vieux démons populistes particulièrement en Pologne, en Slovénie et en Hongrie. Finalement elle n’a pas collectivement cédé ni lâché le camp de la vraie démocratie, en particulier en Hollande, en Grèce, en Allemagne et au Portugal.

Soumise aux mauvaises manières des Britanniques et à la menace militaire Russe du fait de l’agression de Moscou sur l’Ukraine, après un certain flottement à l’automne, le départ de la vieille Chancelière -fille d’un pasteur passé à l’Est- laisse, on le croit, la place à une attitude plus volontaire.

Il nous faut une politique tranchée pour protéger notre continent qui bien que vermoulu incarne, volens nolens, une des meilleures formes du génie humain.

BONNE ANNEE !

Pierre Brousse

La vie du fonds

PUBLICATIONS

Durant ce trimestre, le FDBDA a publié des analyses sur l’Asie, divers sujets maritimes et de relations internationales. Aussi, ce trimestre a été polarisé par la cérémonie des prix et de focus sur les lauréats 2021 du Fonds.

  1. Xi-Jinping dans les pas de Mao – La Story Les Echos
  2. Chine – Arabie saoudite : à l’assaut de l’or noir
  3. Chine : Tonton Xi contre l’Oncle Sam – La Story Les Echos
  4. Anne Cheng – Grand prix FDBDA 2021
  5. Laboratoire EM3B, Ifremer – Lauréat du prix FDBDA-Académie de marine
  6. Jean-Pierre Perrin – Lauréat du prix FDBDA-SEF
  7. Communiqué de presse Lauréats/prix 2021
  8. Chine-Israël : une relation dans l’ombre de la rivalité sino-américaine
  9. Anne Cheng – Lauréate du Grand Prix 2021
  10. Laboratoire EM3B – Lauréat du prix FDBDA-Académie de marine 2021
  11. Jean-Pierre Perrin – Lauréat du prix FDBDA-SEF 2021
  12. La pêche, le Brexit et l’Irlande du nord, un onze Brumaire
  13. Dossier de presse – Prix 2021
  14. L’intérêt croissant de la Chine pour Madagascar
  15. Cérémonie des prix 2021
  16. Quelle stratégie pour la Chine en Afghanistan ?
  17. Chypre : Vers la fin de près de cinq décennies d’un statu quo confortable ?
  18. Une nouvelle lecture de la place des groupes armés dans le droit international (1/2)
  19. Une nouvelle lecture de la place des groupes armés dans le droit international (2/2)
  20.  AUKUS : la France, grande perdante du duel américano-chinois

PETITS DEJEUNERS

Le FDBDA a organisé le jeudi 30 septembre au Yacht Club de France son premier petit-déjeuner débat autour de l’ouvrage commun d’Emmanuel Lincot et Emmanuel Véron « La Chine face au monde : une puissance résistible.

La Chine face au monde : une puissance résistible

Puissance hors normes, la Chine a déjoué tous les pronostics occidentaux. Son développement économique ne s’est pas accompagné d’une démocratisation et son isolement diplomatique doit être relativisé. De plus en plus opposée à l’Occident qu’elle met au défi, elle trouve en revanche des relais importants dans les pays du sud qu’elle séduit depuis longtemps. Pour combien de temps encore ? L’Inde fait le choix d’un rapprochement avec Washington et ses alliés dans une stratégie d’endiguement, l’Indo-Pacifique, dont la viabilité n’en reste pas moins incertaine. L’état économique mondial, la crise environnementale ou le terrorisme montrent que la Chine reste davantage une force de proposition et beaucoup moins un partenaire fiable. Incontournable, elle n’engage pas moins notre avenir et ce vade-mecum accompagnera les décideurs et les opinions de toutes générations dans leurs propres réflexions. Disponible sur capitmuscas.com au format papier (10€) et numérique (6€)

De prochains petits déjeuners seront programmés en 2022, particulièrement sur l’Asie centrale, le Caucase et le Moyen-Orient.

CEREMONIE DES PRIX 2021

L’attribution annuelle de prix est un des importants éléments de son action.

Dans le cadre de ses activités de philanthropie, le FDBDA a remis une contribution aux activités de l’association Marins Sans Frontières.

Fondée en 1984, l’association Marins Sans Frontières a pour vocation de porter assistance et secours dans les pays en voie de développement aux populations isolées par la mer ou dépendantes d’une voie navigable. L’association s’efforce d’améliorer, par des moyens maritimes et fluviaux, leurs conditions de vie et de santé en facilitant les échanges humains, économiques et techniques.

Pierre Brousse et Emmanuel Véron

Le 31 décembre 2021

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